Elysées 2012

Revue des troupes à mi-automne

La campagne n'a pas encore commencé ; nous n'en sommes cependant plus tout à fait aux prémices. Les acteurs sont presque tous en place : manque Bayrou qui semble devoir se déclarer le 2 décembre.

Une série d'articles parus cette semaine laisse entendre que, chacun dans son coin teste ses mots d'ordre, ses stratégies. Que les choses, progressivement, sont en train de se mettre en place. Regardons-y de plus près.

Sarkozy

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Pain béni pour lui que cet accord EELV-PS si besogneux et contre lequel il va irrémédiablement marteler non seulement sur la forme, politicienne, politicarde qui ne viserait qu'à quelques prébendes en terme de siège au risque de compromettre l'avenir énergétique du pays, et donc, le nation elle-même.

Mais qu'il a aussi choisi de pourfendre au nom d'un archaïsme et d'une peur millénariste tout à fait irrationnelle l'objectif même lointain de sortie du nucléaire. Le propos, outrageusement caricatural :

On ne va pas retourner à la bougie ?
Devons nous être le seul pays qui tourne le dos au progrès ? Si nous tournons le dos au nucléaire, on fera le procès du spatial, de la robotique, de l'automobile. (…) Mon intention est de laisser à mes successeurs une société plus moderne

aura eu trois objectifs :

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- souligner encore une fois, l'irresponsabilité économique du PS prompt à adopter des solutions catastrophiques pour l'économie et l'emploi

- relever son irresponsabilité politique dans la mesure où PS et Verts seraient prêts à revenir sur un sujet qui ferait l'objet d'un large consensus politique depuis longtemps et courir le risque d'une division de l'unité nationale

- brocarder son irrationalité dans la mesure où J Fischeril cèderait soit aux irrationnalités milénaristes soit, pire encore aux régressions exotiques des babas-cool îvres d'en revenir à la chandelle...

Outrancier le propos l'est, au moins en ceci qu'il n'est jamais sain de ridiculiser les arguments de l'adversaire et l'est ici, d'autant moins que les risques de ce type d'industrie se seront récemment et abondamment mis à jour après la catastrophe Schröderjaponaise ; de mauvaise foi assurément dans la mesure où les allemands eux-mêmes, d'avec qui on prône par ailleurs tant le rapprochement nécessaire, auront depuis Schröder, entamé cette sortie progressive ; malhonnête, au moins en cela que le consensus sur le nucléaire n'aura jamais, depuis Pompidou, fait l'objet d'aucun débat, a fortiori d'aucun referendum. Ce consensus est posé plus même que supposé et la démarche de nucléarisation de l'électricité française à marche forcée aura toujours été entreprise de telle sorte de rendre le processus irréversible.

Mais ambivalent aussi et potentiellement contre-productif !

Il n'est pas faux que sous la montée des périls environnementaux pointent aussi des craintes ancestrales et les délices de se vautrer masochistement sous le discours de la décadance. Le pire n'est jamais assuré, susurre le bon sens populaire et des gens comme Allègre, en niant non tant la réalité même du réchauffement climatique mais son accellération par l'industrie moderne, surfent évidemment sur cette vague. Nul ne peut effectivement être totalement assuré de n'être pas victime de telle crainte, de telles délices ... pour autant le principe de précaution tant vanté par ailleurs mériterait néanmoins qu'on s'y penche avec un peu plus de sérieux et moins d'outrancière caricature.

Surtout , il n'est pas certain que de telles stratégies ne se retournent pas contre leur auteur. Sarkozy joue trop et avec une prédilection certaine sur la peur : il le fit en 2008 en évoquant la crainte des épargnants lors de la crise bancaire, il recommença lors de la récente crise de la dette et de la zone euro ; il le fait de manière continue en se servant indéniablement de l'insécurité comme d'un bouclier. Pourquoi ces peurs-ci seraient-elles légitimes quand celle-ci serait seulement ridicule ?

A tellement jouer sur cette corde ne risque-t-il pas de scier la branche sur laquelle il est assis ?

Sarkozy est pour le moment déchiré par le même dilemme que tous les sortants : trop jouer sur son bilan l'empêchera de rebondir car on fait une élection sur l'avenir et non sur le passé, mais en même temps il ne peut jouer de son expérience face à l'amateurisme supposé de son - ses - adversaires qu'en s'appuyant sur les acquis de son bilan. Par ailleurs trop taper sur sa gauche ne manquerait pas de lui faire perdre de cette hauteur présidentielle sur qoi il devra s'appuyer et qu'il tente depuis presque un an de recouvrer ; mais pas assez risquerait d'offrir à la gauche un angle d'attaque trop dangereux.

Rentrer dans la mêlée et quand ? Frapper directement ou le laisser faire par ses accolytes (Guéant, notamment ) ? Jouer le consensus présidentiel ou le clivage gauche/droite ?

Telles sont pour le moment les choix cruciaux qui ne semblent pas encore définitivement faits à droite que l'annonce tardive de sa candidature devrait permettre à Sarkozy de repousser encore un peu.

Hollande

Empêtré dans les récents cafouillages, il marque le pas mais il était inévitable que le soufflet des primaires une fois retombé, il retrouve l'étiage politique de son camp. Le parti pris du retrait en attendant le véritable démarrage de la campagne en janvier est une sage décision, pas seulement opportune. Il se doit de ne pas se confondre avec le parti, faute de quoi il perdrait toute dimension présidentielle ; non plus qu'avec les échéances législatives qui ne le concernent pas directement.

Crise et collision entre élections présidentielle et législative sont des pièges indéniables, nous l'avons déjà écrit. Elles le sont pour tout le monde, d'ailleurs. A ce jeu, on verra dans les semaines qui viennent qui s'en sortira le mieux. Mais il est clair dès à présent que si Hollande ne parvient pas rapidement à reprendre du champ, sa candidature sera irrémédiablement plombée d'une faute originelle.

Le Pen

Il y a bien un mystère Marine qui semble commencer à agacer ses propres partisans et les faire douter parfois de sa capacité à entamer une course aussi difficile qu'une présidentielle. Tout, dans l'actualité, semble corroborer ses thèmes de campagne et ses choix et ce n'est rien de dire que la crise de la dette lui offre un angle d'attaque incomparable ... dont pourtant elle ne semble pas profiter. Ce que le Monde appelle les paradoxes de la campagne du FN.

Sans doute la campagne n'a-t-elle pas encore démarré, sans doute n'est-il pas tout fait exact d'écrire comme le fit Libération que son entrée en campagne est un loupé, il n'en reste pas moins que l'organisation manifestement grince encore et souffre de la tribune que la crise offre à Sarkozy. Le programme lui-même semble hésiter qui, après le passage de la préférence à la priorité nationale, atermoie sur l'avenir de l'euro que d'un côté l'on déclare vouloir supprimer ; de l'autre préserver comme unité de compte.

Bayrou

Se déclare ou pas ? Le 2 décembre ou déjà ?

Il n'est pas faux que cette mise en scène de la déclaration de candidature a quelque chose d'un peu ridicule même si en même temps la portée symbolique de l'acte est réelle qui doit précisément conférer à l'impétrant une posture hors de la mêlée.

Bayrou depuis plus de 5 ans sait où il va et se sent manifestement investi d'une mission, sinon d'un destin. A-t-il trouvé dans sa majorité centrale le philtre magique qui lui ouvrira des portes ? Rien n'est moins sûr !

Je reste convaincu que cette campagne se fera sur des mots d'ordre radicaux qu'illustrent parfaitement la forte cote de popularité d'une Le Pen mais aussi de Mélenchon ou, aux primaires d'un Montebourg !

Pour autant, il est frappant de constater que la radicalisation se fait à front renversé : Sarkozy qui devrait jouer la hauteur et le consensus est manifestement tenté par la droitisation et le clivage au moment même où Hollande tente de se faire une image de modéré sérieux.

La chance de Bayrou serait que se reproduise le scenario de 74 où le corps électoral, avide de changement, prêt à en finir avec 16 ans de gaullisme historique, mais pas encore assez pour franchir le Rubicon, opta pour la voie centriste qu'offrait Giscard. Le risque serait qu'il se souvînt que le septennat de Giscard fut corrodé par son absence de parti majoritaire, pourri par l'opposition larvée mais réelle d'un RPR inconsolable d'avoir perdu la présidence et prêt à tout pour la reconquérir, quitte à faire élire Mitterrand en 81.

Le pire serait qu'il oublie, quoiqu'il en dise dans son ITV, que la famille UDF est, décidément éclatée, et saura malaisément constituer un socle solide de gouvernement.  Que le marigot centriste pèse peu même si le coefficient électoral de Bayrou le dépasse largement. Que la vocation centriste est d'être gouvernementale c'est-à-dire, jusqu'à plus ample informé, une force d'appoint et non justement cette force centrale qu'il rêve de constituer. Au moins pourra-t-on observer, dans les semaines qui viennent, les repositionnements, les ralliements. Les rats quittent toujours le navire quand ce dernier prend l'eau. On pourra extrapoler demain l'éventuelle défaite de Sarkozy aux mouvements d'affollement des centristes.

Paradoxalement on pourrait dire qu'une victoire de Bayrou serait une revanche du gaullisme historique : à défaut d'être un candidat au dessus des partis, Bayrou en est un sans parti.

Mélenchon

Aussi brillant soit-il, et inventif en sa capacité d'inventer des réseaux sur le Web, il est en train de se tromper de campagne. Parce qu'il court après celle des autres ... Après avoir déjà déclaré qu'il comptait capitaliser sur les voix des électeurs de Montebourg, voici qu'il lorgne avec l'avidité sourcilleuse des amants déçus, sur les déçus de l'accord PS-EELV !

Ramer double déclare-t-il ? Non ramer tout simplement. Celui qui perd c'est toujours celui qui subit la campagne et les thèmes des autres. Son allant du printemps venait peut-être seulement de ce qu'alors il était seul ou presque en lice. On ne séduit pas par la déception des autres ; on n'existe pas politiquement par l'échec des autres.

Joly

Qu'en dire qui ne le fut déjà sinon ceci : elle illustre magnifiquement ce que d'aucuns cachent ou répugnent à avouer. Bien sûr il n'est rien de pire que de voir se constituer une classe politique arcboutée sur ses prérogatives et ses privilèges ; bien sûr, l'antidote ne peut être que la limitation du cumul des mandats voire son interdiction et, pourquoi pas, l'interdiction au delà d'un certain âge de se représenter pour éviter que ne se produisent des sinécures avérées.

Néanmoins la politique est bien un métier ! Et l'on pourrait s'interroger sur une disposition qui eût ôté toute assise politique à un J Ferry, à un Clemenceau, à un Jaurès même ; à un Poincaré, un Blum, un Mendès sans compter, plus récemment, des Debré, Mitterrand, Chaban-Delmas ...

Evidemment le cafouillage va laisser des traces et l'on observe que ce n'est même plus seulement celui du PS face aux Verts mais que cela devient celui de Joly elle-même.

Dans la grande tradition républicaine les tenants de la société civile ont toujours été des forces d'appoint que l'on s'allie, des seconds couteaux derrière qui, parfois, l'on se protège. Jamais des fers de lance !

Que les pudibonds du politique s'en souviennent !


pris sur deux jours seulement dans Libération et le Monde

Mélenchon enquête 1 bataille des droites néogaullisme
Joly enquête Monde posture Sondage BVA
  rebond de Sarkozy repères Image Sarkozy

Le FN pourrait conserver l'euro en parallèle du franc dans son programme Le Front national, partisan du retour au franc, envisage d'inclure dans son programme pour 2012 le maintien en parallèle de l'euro comme monnaie de réserve, laquelle pourrait à terme redevenir la monnaie unique européenne, a déclaré vendredi 25 novembre un conseiller de Marine Le Pen. "Nous sommes pour conserver une monnaie commune parce que ce qu'il y avait d'intéressant dans l'euro, c'est bien sûr d'essayer un jour (...) d'avoir des réserves aussi importantes que le dollar", a déclaré Thibaut de la Tocnaye, au cours d'une table ronde consacrée aux propositions des partis politiques pour les PME.

Cette "monnaie commune" serait comparable à l'ECU ("European currency unit"), l'ancienne unité de compte de la Communauté européenne qui était constituée d'un panier de monnaies. "L'euro n'aurait plus que ce rôle" de "monnaie de réserve qui serait une monnaie commune", a-t-il insisté. "C'est une option mais ce n'est pas tranché". A terme, M. de la Tocnaye envisage même un retour à la monnaie unique européenne, en évoquant "la possibilité de favoriser la montée en puissance un jour d'une monnaie commune qui pourrait devenir de nouveau unique mais qui concurrencerait le dollar".

Le Monde du 25 noov