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Sarkozy cite Jaurès 27 fois à Toulouse

En soi, décidément, rien de choquant à ce qu'un candidat, fût-il de droite, citât Jaurès. Éloge du vice à la vertu ou simplement reconnaissance de l'histoire.

Oui bien sûr, Jaurès appartient à l'histoire de France, il n'est la propriété de personne! Mais qui l'a prétendu jamais?

En réalité tout ce discours tourne autour de la valeur, d'une valeur que la gauche aurait trahie. Tout le discours est construit autour d'une anaphore entêtante et entêtée de la trahison de la gauche.

Sarkozy réinvente une vieille dichotomie: non pas vérité/mensonge mais vérité/trahison.

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trahison du travailleur

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trahison de la nation

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trahison de l'école

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trahison de la laïcité

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Tout le discours tourne autour de cette vérité qu'il nous promet de dire puisque lui seul l'aurait comprise: d'où l'inflation de vérité, réalité dans son propos.

On pourrait aisément repérer les détournements, les contrevérités, mais ce serait évidemment inutile. On pourrait sans doute chercher chez Jaurès tout ce qui dans sa pensée dément Sarkozy, mais à quoi bon.

Dans ce discours, comme dans tous les autres, l'impétrant s'affiche pour ce qu'il est:

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sous la figure du rassembleur, figure obligée d'une présidentielle, celle de l'imprécateur fustigeant une gauche qui n'aurait rien compris à rien, aurait oublié les fondamentaux; une gauche qui faudrait renvoyer à ses chères études

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sous la figure du lettré, celle du réactionnaire, au sens premier du terme: les solutions sont toujours à aller rechercher dans le passé, idylliquement travesti. La promesse faite est celle d'un retour en arrière, quitte à reconnaître au passage que la droite elle-même, se fût elle aussi passablement oubliée.

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sous la posture de la sincérité, celle de l'autorité. Sarkozy jamais n'argumente; toujours assène sa vérité, comme il dit; une vérité qu'il qualifie de courageuse (ah bon pourquoi?). Le critiquer c'est l'insulter puisque ce serait offenser sa sincérité ou ce sentiment d'attachement et de fierté qu'il voue à la France. Sarkozy n'est pas critiquable puisque sincère! On glisse systématiquement du registre de la raison à celui du sentiment.
Ce n'est pas habile, c'est malhonnête!

On reconnaîtra enfin dans ce discours cette haine, si forte, à l'endroit de Mai 68, déjà relevée.

Haine qui tourne à l'obsession. Mais haine qui donne un sens à la démarche.

Depuis très longtemps (dès 85) Sarkozy se complaisait à affirmer combien la droite perdait sitôt qu'elle avait honte d'être à droite: il reste cohérent. Mais réalise-t-il combien c'est à toute la génération du baby boom qu'il tourne ainsi le dos?

Cet homme nous promet une refondation: un retour d'avant la faute originelle. C'est en ceci qu'il est sans doute plus religieux qu'un Bayrou; plus dangereux aussi !

1) Toulouse le 12 Avril  (écouter) lire

2)