JP Brissot
SECONDE LETTRE D'UN DÉFENSEUR DU PEUPLE A L'EMPEREUR JOSEPH II, sur son règlement concernant l'émigration, et principalement sur la révolte des Valaques, où l'on discute à fond le droit de révolte du peuple. — Dublin, 1785. 98 p.
« Qu'est-ce qu'une révolte? Les princes ont-ils le droit de pµnir les révoltés? S'ils l'ont, doivent-ils infliger la peine de mort, doivent-ils imaginer pour eux des supplices raffinés? (...)
Tous ceux qui ont écrit sur la révolte des Valaques semblent avoir conspiré contre le malheureux peuple, pour t'encourager, Prince, à punir les chefs par d'horribles supplices, à serrer les liens du peuple. J'en ai vu même qui plaisantaient sur les routes où le « démagogue » Horia (comme ils l'appelaient) devait finir ses jours. Loin de moi la doctrine abominable de ces monstres qui prostituent leurs plumes pour le malheur des peuples. Puisse un jour le ciel accumuler sur leurs têtes toutes les horreurs de la servitude qu'ils prêchent avec tant de scélératesse
(...)
Oh! si j'avais en main les pièces de ce procès, si j'avais observé pendant quelque temps le sort de ce peuple, si je l'avais suivi dans ses travaux comme dans ses tourments, si j'avais vécu dans ses chaumières, dans le sein de la terre, souvent son unique asile, si j'avais assisté à la conspiration et si j'avais été témoin de ses supplications au souverain pour terminer sa misère, de ses combats pour la finir lui-même, avec quelle vérité, quelle énergie je le défendrais ! Mais loin du théâtre de cette guerre, n'ayant sur elle que les détails ou arides ou mensongers des gazettes, seul, presque sans lumière, et n'étant soutenu que par le zèle qui m'entraîne à défendre le peuple partout où je le vois se débattant sous le couteau de l'oppression, que puis-je faire, sinon de prouver par le récit même du parti qui a triomphé, que les Valaques étaient fondés dans leur insurrection ? ... C'est ce récit à la main que je prétends prouver l'injustice de leur condamnation.
Les Valaques se sont révoltés; donc ils avaient raison de se révolter. Voilà ma première preuve ; elle paraîtra singulière, elle n'est que naturelle .